Anna entre avec hésitation dans l’hôpital
psychiatrique.
Le directeur lui a téléphoné ce
matin pour lui annoncer le décès de son oncle Pierre.
A la mort de ses parents, elle a
pris en charge financièrement cet oncle interné d’office, frère jumeau de sa mère;
mais elle n’a jamais eu le courage de le rencontrer.
L’asile de fous la terrorisait.
Maintenant Pierre est parti et elle
doit récupérer ses affaires.
Personne n’a expliqué à Anna qu’elle
était la folie de son oncle. Elle le découvrira peut-être aujourd’hui. Qui sait…
Une grande et forte femme l’accueille
gentiment :
-Bonjour, je suis madame Marshal,
infirmière en chef. Le directeur vous recevra plus tard pour signer les
papiers. En attendant, veuillez me suivre, je vais vous conduire dans la
chambre de votre oncle.
Anna suit silencieusement
l’infirmière dans les escaliers. Au deuxième étage elles franchissent une porte
blindée qui se referme derrière elles en claquant. Anna sursaute. Madame
Marchal la presse et la jeune fille la rejoint devant une porte bleue :
- voilà
je vous laisse faire le tri dans ses affaires : emportez ce que vous
voulez et nous nous occuperons du reste. A toute à l’heure, dit la matrone en
repartant.
- Et
pour sortir, je fais comment ?demande Anna.
- Ah
oui ! voilà un bip. J’arriverai aussi vite que possible mais cela peut
prendre du temps. Ne vous inquiétez pas.
Anna la remercie puis elle se
retourne et observe la chambre où son oncle Pierre a vécu durant trente ans. La
pièce comporte un lit, une chaise, un bureau et une armoire. Une porte au fond
doit être le cabinet de toilette.
Une valise repose sur le lit. Sur
le bureau un épais classeur attire son attention. Elle s’approche et l’ouvre
lentement. Une ombre surgit soudain de la salle de bain et s’empare du dossier.
Anna recule brusquement et fait face à un homme d’une quarantaine d’années. Il
la regarde l’air effaré. Sans le savoir, Anna lui barre la seule issue
possible. La jeune fille tente de le
calmer :
- Bonjour,
je m’appelle Anna. Pierre était mon oncle.
- Ils
m’appellent Proust, bafouille l’homme. Il ajoute d’une voix plus ferme. Mais
mon vrai nom c’est Jules. Je travaillais avec votre oncle et ça, dit-il en
montrant le dossier, c’est à moi.
- Vous
travailliez sur quoi ? demande Anna, curieuse.
Jules s’approche et murmure :
-tout le monde le prenait pour un
fou mais il a réussi ! Nous avons réussi !
-Vous avez réussi quoi ? Questionne
la jeune fille.
- Vous faites vraiment partie de sa
famille ? Vous avez une pièce d’identité sur vous ? demande Jules
soudain soupçonneux.
- euh oui je dois avoir mon
passeport. Devant son regard fixe elle fouille dans son sac. Tenez.
L’homme vérifie le nom et lève la
tête pour comparer Anna à sa photo. Il lui rend son passeport et réfléchit
pendant un moment. Puis il semble prendre une décision. Il va s’asseoir sur le lit et fait signe à la
jeune femme de le rejoindre. Anna hésite un peu mais la curiosité l’emporte.
Après tout, cet homme était l’ami de son oncle ou ce qui y ressemblait le plus
dans cet asile.
Ecriture libre - Monotype - A.Chenu |
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